Le Consort et les trois claviers

On sait Mozart (1756-1791) une valeur sûre. Le Festival de Pâques de Deauville  est attentif à la découverte de répertoires. Mais il a aussi soin de doser ses programmes. Le prodige de Salzbourg satisfait sans conteste un public, moins porté sur les compositeurs du XXe siècle. Cette soirée du dernier jour d’avril avait tout pour lui plaire avec un choix d’œuvres _ sonates et concertos _ qui couvrent près de quinze  ans de la vie de Mozart. L’interprétation enthousiaste du Consort lui a donné une qualité profonde et délicate. Justin Taylor, successivement au clavecin, à l’orgue et au piano forte, s’y est associé avec une aisance confondante.

 

L’influence de Jean-Chrétien Bach est avérée  dans les trois concertos réunis sous la cote K 107.  Mozart rencontre le fils du cantor de Leipzig au cours d’une tournée en Angleterre en 1765. Il n’a que neuf ans. Et contrairement à une idée reçue, c’est bien plus tard qu’il compose ces œuvres, dont le style italien doit autant à l’influence des sonates du  Bach junior qu’à trois voyages sous le soleil méditerranéen.

Le premier de ces concertos (en ré mineur) est une œuvre courte pour petit effectif, clavecin, deux violons et un violoncelle.  Les archets de Théotime Langlois de Schwarte et de Sophie de Bardonnèche donnent d’emblée un éclat à une partition enjouée, soutenue en arrière-plan par le violoncelle de Hanna Salzenstein. Sous les doigts de Justin Taylor, visage enfantin au sourire euphorique, le clavecin évolue en cadences marquées pour s’épanouir en volutes.

Le ton est donné. La Sonate K 328 qui suit apporte, par sa fonction d’église, une certaine solennité, rendue discrète toutefois par le souffle mesuré d’un petit orgue. Mais c’est bien un sentiment d’allégresse qui traverse cette œuvre en un seul mouvement.

Retour au clavecin pour le deuxième concerto (toujours K 107) inspiré de Jean-Chrétien. Les spécialistes pointent les différences et nouveautés comparé au premier du triptyque. L’auditeur, lui, se laisse porter par les échanges entre cordes frottées et cordes pincées dans des jeux de préséances et d’accompagnement délicieusement conduits.

La Fantaisie (K 397) qui ouvre la seconde partie du concert fait d’abord place exclusive au piano forte, cet instrument commence à se développer dans la deuxième partie du XVIIIe siècle. Sa nouvelle technique de cordes frappées par des marteaux depuis un clavier annonce la révolution pianistique. Mozart explore dans cette œuvre  un champ d’expérimentations, dont Justin Taylor restitue toutes les pistes.

La dernière partie du programme forme un peu la synthèse de tout ce que Mozart a mis en œuvre dans ses précédentes compositions. Son Concerto en mi bémol piano forte et quatuor à cordes (K 449) ouvre une série riche de douze opus écrits en trois ans, à partir de 1783. L’altiste Mathurin Bouny vient compléter la formation.

L’intérêt de cette pièce en trois mouvements est qu’elle parfaitement adaptée pour de la musique de chambre. L’écriture de Mozart scintille de trouvailles que les musiciens du Consort jubilent à sublimer. L’accueil du public suscite un bis et un autre, que Timothée Langlois de Schwarte présente comme une bande-annonce du prochain Août musical. Son groupe du Consort l’ouvrira le vendredi 29 juillet avec un programme 100% baroque italien. Et donc du Vivaldi bien-sûr, dont il offert avec Sophie de Bardonnèche un échantillon ébouriffant !

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Concert du samedi 30 avril 2022, donné à la salle Elie-de-Brignac, à Deauville

 

 

 

 

 

 

 

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