Jouer l’intégrale des quatuors de Josef Haydn (1732-1809) sur neuf saisons, tel est le pari fou engagé, en 2017, par le Quatuor Cambini-Paris conduit par le violoniste Julien Chauvin. Pari tout autant audacieux, tenu par Patrick Foll, directeur du théâtre de Caen. Il y avait quand même 68 œuvres au compteur, d’où le titre de « Route 68 » donné à cette aventure. La dernière étape s’est déroulée brillamment dans les foyers du théâtre caennais, combles comme très souvent. La page n’est pas complètement tournée. Un grand rendez-vous, « Osez Haydn ! » attend les spectateurs, le troisième week-end de mars.
« Requiem(s) », opéra cosmique
Cinq représentations à guichet fermé pour sa nouvelle création, « Requiem(s) ». La cote d’amour du public du théâtre de Caen à l’égard d’Angelin Preljocaj ne se dément pas. Le chorégraphe séduit et émeut avec cette production portée par le souvenir de proches récemment disparus. Le deuil est décliné par une danse nourrie de symboles et stupéfiante de précision. Musique, costumes, éclairages y sont finement associés pour donner une dimension opératique à ce spectacle de haute qualité.
« L’Uomo femina », le sceptre et la quenouille
La saison lyrique du théâtre de Caen s’est ouverte par une œuvre sortie de l’oubli par Le Poème Harmonique de Vincent Dumestre. « L’Uomo femina » est un opéra du compositeur vénitien Baldassare Galuppi sur un livret de Pietro Chiari. L’action se déroule sur une île dominée par les femmes, jusqu’au moment où débarquent deux naufragés. L’argument plutôt hardi en cette deuxième moitié du XVIIIe siècle résonne singulièrement près de trois siècles plus tard. La mise en scène d’Agnès Jaoui en souligne avec finesse et son humour et son ambiguïté portés par le chant et la musique.
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L’Orchestre national d’Ukraine, double hymne
Soirée exceptionnelle au théâtre de Caen avec la venue de l’Orchestre de l’Opéra national d’Ukraine. La formation musicale répondait à l’invitation du Mémorial de Caen, dont le directeur, Kléber Ahroul, a voulu marquer ainsi un « soutien indéfectible au peuple ukrainien dans son combat pour la liberté ». Dirigé par Mykola Diadiura, l’orchestre a reçu dans une salle pleine un accueil aussi chaleureux que prolongé. Il saluait le courage de ces musiciens, pour qui le passage à Caen aura été une courte période de répit, au même moment où Volodymyr Zelensky, était reçu à l’Elysée. Il a même été envisagé que le président ukrainien fasse un détour à Caen, ce qui aurait entraîné un renforcement autre de sécurité. L’idée a été vite abandonnée.
Le Carnaval baroque : tréteaux et barriques
En ces temps de morosité que tente de conjurer une flamme olympique nomade, le spectacle de clôture (ou presque) la saison du théâtre de Caen, a vertu à stimuler les zygomatiques. « Le Carnaval baroque » imaginé par Vincent Dumestre et son Poème Harmonique associe musique, farce et acrobaties. La mise en scène haute en couleurs de Cécile Roussel donne le ton à un vent de folie truculent. Il entraîne dans une Sérénissime en fête, riche de ses compositeurs du XVIe-XVIIe siècles.
Un « Dom Juan » de bruit et de fureur
Avec « Dom Juan ou le Festin de Pierre », Molière venait bousculer le bal des hypocrites _ l’affaire « Tartuffe » n’est pas loin. Pour cette pièce singulière, le metteur en scène David Bobée, directeur du Théâtre du Nord, opte pour un personnage moins séducteur que prédateur. Il ne le ménage en rien dans un spectacle où les saillies comiques d’un Sganarelle sont submergées par l’énergie féroce et pathétique de son maître. Elle bascule vers la dramaturgie shakespearienne, soutenue par une musique percutante jusqu’au KO fatal. Une distribution cosmopolite caractérise aussi ce travail, qui tient le spectateur en haleine.
Quatuor Cambini, mouvement et mouvement
En un seul trimestre, le Quatuor Cambini a rempli son contrat de la saison 23-24. Comme un coup d’accélérateur dans le slalom d’un calendrier bien chargé, avant la dernière ligne droite au bout de cette Route 68. Dans un an, la formation emmenée par Julien Chauvin aura interprété l’intégrale quatuors de Josef Haydn (1732-1809), le créateur prolifique du genre. Les foyers du théâtre de Caen en sont le lieu d’accueil, où, à chaque rendez-vous, une personnalité est invitée. Cette fois, pour ce troisième concert, c’est Alban Richard, directeur du Centre chorégraphique national de Caen-Normandie, pour parler des relations entre musique et danse.
« On achève bien les chevaux », « hippodrame »
Du célèbre roman d’Horace Mc Coy, « On achève bien les chevaux » (1935), le cinéaste Sydney Pollack a tiré une adaptation marquante, en 1969, avec la remarquable Jane Fonda. Le transposer au théâtre était un défi que se sont lancés le chorégraphe Bruno Bouché et les metteurs en scène Clément Hervieu-Léger et Daniel San Pedro. Danseuses et danseurs du Ballet de l’Opéra du Rhin, comédiennes et comédiens de la Compagnie des Petits Champs ont investi la scène du théâtre de Caen dans un tourbillon haletant.
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« Les Dissonances » tirent leur révérence
Des applaudissements à tout rompre, une ovation debout. Le public du théâtre de Caen a salué chaleureusement le magnifique concert donné par collectif « Les Dissonances » et son fondateur et animateur, le violoniste David Grimal. Cet accueil exprimait une reconnaissance teintée de regret, sachant que ce rendez-vous était le dernier. L’année 2024 marque les vingt ans d’une formation atypique, mais son modèle, mis à mal par les contraintes financières, oblige à baisser le rideau à la fin de l’année. L’orchestre ne reviendra pas à Caen, où il aura laissé de beaux et grands souvenirs. Avec les musiques de Béla Bartók et de Serge Prokofiev pour cette ultime rencontre.
Le Quatuor Cambini et l’art de la perruque
Le Quatuor Cambini-Paris voir poindre le bout de sa « Route 68 ». Depuis 2017, la formation conduite par Julien Chauvin s’est engagée dans un projet fou : interpréter l’intégrale des quatuors de Josef Haydn, inventeur et maître du genre. Les foyers du théâtre de Caen accueillent cette aventure de trois étapes par saison. Son originalité réside aussi dans la venue, à chaque concert, d’une personne spécialiste. Elle apporte, par ses connaissances ou son art, un éclairage sur l’époque du compositeur. Cette fois, il a été question de maquillages et de perruques.